- Les visages du patriarcat: les jeux font-ils mieux que les autres arts et médias ?
- Ce que les jeux disent du colonialisme et du post-colonialisme ?
- Histoire de la presse jeu vidéo en France: du test à la critique
Intervenant.e.s : Selene Tonon, Murielle Schlag, Eva Minig, Florent Maurin.
- Si parler de patriarcat et de JV est complexe c’est parce que ce sexisme se retrouve omniprésent dans tout un tas d’éléments inhérents au monde du JV : il faut bien entendu parler du jeu en soi mais également des personnes qui y jouent, de la manière dont le jeu est reçu et de l’industrie qui est derrière. C’est donc un sujet extrêmement large qu’il faut parvenir à baliser en à peine 2 heures.
- Le JV est une industrie culturelle comme les autres: avec ses spécificités mais également ses contraintes matérielles, économiques et le fait de s’inscrire dans une société qui est sexiste. En gros, le JV n’a pas créé le sexisme, il renforce des mécanismes déjà solidement ancrés. Le sexisme omniprésent de cette industrie n’est pas arrivé comme par magie: il est la conséquence d’oppressions qui existaient bien avant. Rappeler que le JV est une industrie était, il me semble, très important dans cette conférence: de cette manière, on souligne qu’il y a derrière chaque jeu des gens qui créent le contenu, réfléchissent dessus, cherchent un moyen de le vendre et que ces gens font partie d’un système. Pour changer un jeu il faut donc aller plus loin qu’en modifier son contenu, il faut changer l’industrie derrière, et par exemple, mettre plus de femmes à des postes décisionnels ainsi que légitimer la place des femmes dans le Jeu Vidéo etc. Je prends l’exemple des femmes mais cet argument est valable pour toutes formes de minorités souvent peu visibles et mal représentées. On ne peut pas seulement éduquer, il faut également changer les individus ayant le monopole sur la production et la création de JV.
- Le JV est un art, un média, mais c’est surtout du jeu: le jeu qui est sensé réunir, intégrer, permettre de tisser des liens ou tout simplement de développer ses idées apparaît alors comme étant devenu un format excluant. Le jeu ici divise, il rejette, il invisibilise: il est parfois sexiste, homophobe, transphobe. Bref, le jeu a perdu sa vocation première et non pas à cause de règles explicites qui chercheraient à rejeter une certaine partie de la population mais bien par des normes implicitement intégrés et déjà présentes au sein de la société. Ce qui est bien plus difficile à combattre.
- Réfléchir en termes de post-colonialisme n’est pas forcément pertinent, il vaut mieux parler de néo-colonialisme afin de prendre en compte le système socio-économique actuel qui s’est construit sur une idéologie coloniale. Le terme « post » tend à concevoir les choses comme si le colonialisme était définitivement terminé. Or, ici, on voit clairement que ce n’est pas le cas. Ces jeux vidéo ne peuvent pas être vus comme de la fiction pure et anodine à partir du moment où ils participent à une forme de réécriture de l’Histoire. Tout l’intérêt de la conférence était alors de montrer que les mécanismes racistes, stéréotypés et exoticisants qu’on peut voir dans les JV sont le fruit d’une société raciste ayant déjà cette vision là des populations racisées. Ces erreurs/mauvaises représentations-interprétations-lectures historiques, géographiques, spatiales, de la population d’un pays etc. sont donc à souligner.
- Ces représentations racistes peuvent être A/ explicites; comme quand on parle du white-washing où c’est la non-visibilité des personnages non-blancs dont il va être question. Ou B/ plus insidieuses; quand ce sont des éléments qui paraissent anodins, intégrés dans la trame narrative, et qui combinés ensemble favorisent le système actuel (ex : le cas du « white savior » venant libérer les habitants racisé.e.s d’un pays).
- Ces problématiques ne doivent pas seulement être relevées dans les JV mais également dans l’industrie qui va les produire. Tout comme la conférence sur le patriarcat, rappeler que le JV est une industrie dont le monopole est largement détenu par des entreprises occidentales est important. Déjà, parce que cela explique beaucoup sur les représentations racistes issues des JV. Ensuite, parce qu’il est peut-être temps de ne plus forcément attendre grand chose de ces multinationales. Sommes-nous en train de prendre le problème à l’envers ? Ne faut-il pas plutôt se pencher sur des JV souvent indépendants et produits par des personnes racisées, vivant parfois dans des pays anciennement colonisés? Au lieu de nourrir ce système qui n’évolue que lorsque cela est susceptible de l’arranger d’un point de vue économique, n’est-il pas temps d’aller voir ailleurs pour découvrir des jeux plus « honnêtes » d’un point de vue historique, en matière de représentation etc.?
Intervenant.e.s : Mathieu Triclot, Vincent Berry, Maria Kalash, Cyrielle Maurice.
Et enfin, la dernière conférence ! A la base, je n’étais pas trop sûre d’y aller car l’angle pris pour parler de la presse me semblait pas forcément facile à comprendre pour une novice. Ici, on n’allait pas parler de la manière dont le JV pouvait être perçu par la presse mais plutôt de l’évolution de la presse JV, c’est-à-dire une presse spécialisée. Je craignais pas mal de me retrouver complètement perdue mais le fait de l’aborder de façon historique en suivant un certain fil chronologique a été un gros avantage pour m’aider à en comprendre plus.
Les éléments intéressants de la conférence :
- La presse du JV était au début une presse avant tout technique. Pour passionné.e.s, certes, mais qui s’intéressaient bien plus aux machines qu’aux jeux. Ce n’est que petit à petit qu’une presse « critique » a vu le jour. Cette presse s’est construite en étant confrontée à plusieurs luttes et rapports de force : le JV étant vu comme chronophage, un art non-authentique, un sujet illégitime etc., il a été très mal perçu par la culture institutionnalisée.
- Ce que donner une note à un jeu révèle de la presse JV : tout d’abord que les personnes jouant aux jeux vidéo et qui travaillent dans la presse JV ne font pas que partager leurs goûts. Ils sont également là pour offrir une expertise dans un domaine qu’ils maîtrisent. Ils se font les spécialistes de cette industrie culturelle et doivent savoir jongler entre une phase de test du jeu (aspect purement mécanique, plutôt objectif) et une phase critique (analyse du contenu, place plus importante des affects, subjectivité).
- Les contraintes socio-économiques façonnent-elles le monde de la critique JV ? Je ne parle pas en termes de « vendre son avis » (pub, placement de produit *même si la pression des éditeurs reste possible* etc.) mais plutôt du fait que la presse JV s’inscrit dans un système économique évoluant sans cesse. Mais aussi parce que le JV se démocratise également. Il faut souvent produire plus (d’où le manque de temps pour tester un jeu de manière complète) en termes de contenu mais aussi prendre en compte de nouveaux publics. Désormais, celles et ceux jouant aux JV sont nombreux/ses. L’offre s’élargit mais aussi les possibilités de créer des marchés de niche, avec une presse de plus en plus spécialisée et pointue sur des types précis de JV. Est-ce une force ou une faiblesse ? Est-ce qu’il faut se plier à ces nouvelles perspectives au risque de dégrader ce qui a pu plaire à son lectorat initial?
Après en avoir lu ton ressenti, il me tarde de pouvoir visionner les rediffusions sur Youtube!
C'est intéressant de voir un.e novice s'intéresser aux jeux vidéo et en parler.
Ça amène un autre regard sur le support. Les conférences Stunfest ont toujours été pour moi enrichissantes. Les thèmes abordés sont généralement peu « commun » qu'à l’accoutumé. (C'est assez rare de voir des conf sur « Ce que les jeux disent du colonialisme et du post-colonialisme » Vraiment).
Il y a tellement de choses à dire via le JV. Particulièrement sur l'humain, sa réaction face à certaine situation, son comportement, le film « The King of Kong, A Fistful of Quarters » est particulièrement prenant. Et montre des passionné.e.s dans le milieu. (Je te le conseille vivement).
En ce qui concert la presse JV, j'attends de voir la conf quand elle sera en ligne.
La presse en ligne est vraiment différente du format papier. Comme tu l'indique bien, l'apport de la vidéo est un grand plus, pour beaucoup de choses. Gamekult l'a très bien compris par exemple. Site qui vie de ses abonnements premium (et propose donc des dossiers ultra complet, pointu, fournit sur des séries de jeux vidéo, avec des thématiques variées, pour ses abonné.es)
Sur la conférence du colonialisme et du post-colonialisme, ont-ils parlés de l'industrie jeux vidéo du Japon ?
Car niveau nationalisme, racisme on atteint des sommets à la limite de l’impensable.
Merci pour ton article !
Bonjour 🙂
J'ai trouvé ton compte rendu très intéressant, mais j'aurais quelques questions/remarques si ça te dérange pas. Je joue fréquemment à des jeux vidéo et les questions soulevées par la justice social m'intéressent énormément.
Tout d'abord, je trouve ça dommage de ne pas avoir poussé plus en avant la réflexion. Bien sur,c'est aussi possiblement moi qui n'ai pas compris. Par exemple, je n'ai pas bien saisi l'importance des personnages dans les RPG dans la première conférence, surtout appliquée à la question du genre. Il est rare de trouver un jeu qui discrimine activemnt les femmes (ou les hommes). Le seul exemple vraiment marquant qui me vient est « Mount and Blade », ou « Crusader Kings », où c'est expliquable de par un souci d'authenticité historique (les deux se situant dans un contexte médiéval). Si en revanche, tu parle de transidentité, je suis assez d'accord, notamment en ce qui concerne la représentation de personnages transgenres dans les jeux vidéo (un exemple, positif, est Dragon Age Inquisition. Un personnage secondaire est transgenre FtM, la personne joueuse l'apprend uniquement en lui demandant, quand il dit être désolé de ne pas être né femme, un autre personage le reprend en disant qu'il est « un vrai homme »). Il est aussi dommage que les jeux ne proposent pas une variante à « Homme/Femme », en proposant par exemple « Sexe Biologique », puis « Genre » (en offrant une liste, ou en laissant la personne joueuse écrire les pronoms qu'elle préfère).
Il me semble que tu établis une « échelle » (par manque d'un mot plus approprié), en mettant tout en haut l'homme cis, et tout en bas la femme cis. Est ce que cela signifie qu'une femme trasgenre est « supérieure », dans le sens où elle a plus de privilèges, qu'une femme cis? Parce que ce serait alors ignoré le cis privilege: Une personne cis a plus de privilèges qu'une personne transgenre. Mais encore une fois, peut être que je t'ai mal comprise.
Je trouve que c'est aussi dommage de ne pas avoir plus illustré certains points. J'ai du mal à voir le néo colonialisme dans les jeux auxquels je jouent, bien que dans certains ils soient assez flagrants (notamment dans la série Far Cry, où la personne joueuse incarne un homme blanc cis sauvant un pays littéralement sous développé qui n'aurait pas pu s'en sortir sans lui).
Tu parles de l'omniprésence du sexisme dans le jeu vidéo, mais cette notion d'omniprésence pourrait être discutée. Il y a du sexisme dans le jeu vidéo, mais peut on vraiment dire qu'il est omniprésent? Si c'était le cas, pourquoi des développeurs créeraient ils des jeux dont le casting est presque exclusivement constitué de personnages féminins? Et pourquoi des joueurs choisiraient ils d'acheter et donc d'incarner ces personnages? Ca fait plus de 10 ans que je joue, de mon expérience je n'ai pas remarqué plus de sexisme dans le jeu video qu'ailleurs. Je n'ai d'ailleurs jamais vu des « campagnes » de harcèlement ciblant des femmes UNIQUEMENT à cause du genre auquel elles s'identifient, il a toujours eu d'autres éléments qui primaient. De la même façon, les développeuses ayant peur de travailler à cause de leur genre restent rares.
Je pense néanmoins qu'il est très important de s'intérroger sur les causes du sexisme (que ton article, malheureusement, ne présente pas).
Merci beaucoup pour ton compte rendu en tout cas 🙂
Alors il me semble que des choses devaient être dites sur le Japon (JE CROIS) mais y a un intervenant qui est pas venu finalement 🙁
Merci pour ton commentaire !
merci pour ton commentaire 🙂
1/ http://www.buffy-mars.net/2016/03/temoignage-cachez-cette-joueuse-que-je.html
2/ Tu pourras sûrement voir les rediffusions des conférences.